Commission Culture  | Je posais récemment une question relative à la situation des artistes en Fédération Wallonie-Bruxelles, à Bénédicte Linard, viceprésidente du gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes, au sein de la commission intitulée «Covid-19 – Mesures liées à l’emploi artistique». Vous trouverez ici l’essentiel de cet échange.

Les mesures d’urgence en faveur de l’emploi artistique ont déjà fait l’objet de longs débats au sein de notre commission. Malheureusement, le cadastre de l’emploi artistique n’existe toujours pas. Quelles sont les pistes étudiées afin de remédier à cette situation? Qui peut répondre aujourd’hui aux questions des artistes en Fédération Wallonie-Bruxelles? Le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles évoque dans sa Déclaration de politique communautaire (DPC) l’idée de «relancer le Guichet des Arts». Est-ce que ce lancement est bien prévu? Si oui, à quelle échéance? Je pose la question dans la mesure où le Cultuurloket fonctionne en Communauté flamande: les artistes flamands reçoivent donc un soutien grâce à des permanences sociales et juridiques sur toutes les questions relatives à leur statut social et fiscal. Ils bénéficient en outre de séances d’information, de formations et de consultations gratuites. Un guichet unique pour tous les artistes en Fédération Wallonie-Bruxelles serait utile en cette période de crise sanitaire.

Bénédicte Linard :“La synthèse de l’enquête réalisée par l’Union des artistes du spectacle (UAS) contient de nombreux enseignements qui nourrissent ma réflexion et celle de mon cabinet. Nous entretenons régulièrement des échanges avec cette fédération et son président. Comme vous le savez, l’autorité fédérale est exclusivement compétente pour le statut social des artistes. Pour rappel, ce statut n’est qu’un accès privilégié au régime du chômage. Certaines avancées ont été amenées par la ministre Muylle quant au prolongement de la période de référence pour l’accès et le maintien de ce statut. En conférence interministérielle (CIM) Culture, nous avons convenu de nous revoir très prochainement, particulièrement sur ce point, afin de construire une réponse pérenne concernant le statut d’artiste. Ce statut est enfin à l’agenda du pouvoir fédéral. Je m’en réjouis!”

Cette réunion n’était qu’une première étape. “Le cadastre de l’emploi artistique nous aurait été certes bien utile, s’il avait existé, pour évaluer les conséquences de la crise sanitaire. Mon cabinet, à peine constitué, a dû déjà faire face à cette crise sans précédent après quelques mois. Nous n’avons donc d’autre choix actuellement que de gérer les urgences les unes après les autres. La constitution du cadastre est néanmoins loin d’être écartée. Je compte mobiliser mon administration et l’Observatoire des politiques culturelles (OPC) pour réaliser une enquête quantitative et qualitative des effets de la crise. Cela permettrait une première photographie de l’emploi artistique en Fédération Wallonie-Bruxelles, première d’une longue série, je l’espère, car, comme vous le soulignez, il est nécessaire de connaître ces réalités. En ce qui concerne le Guichet des Arts, l’ordre du jour de la première CIM Culture qui s’est tenue ce mardi matin, en concertation avec le cabinet du ministre flamand de la Culture, M. Jambon, était focalisé sur les questions liées à la crise sanitaire. Cette CIM était donc une première et nous avons convenu de nous revoir rapidement pour discuter des autres sujets qui nécessitent une coordination entre les différents niveaux de pouvoir; le Guichet des Arts en fait partie.”

Il y a en effet deux grands aspects dans cette crise vécue par le monde culturel. Le premier est l’urgence sociale que vivent les artistes sans statut. M. Pierre Dherte vous disait sur le plateau de notélé que «cela fait 20 ans que le travail est prêt pour le statut d’artiste».  Cette crise sera, je l’espère, l’occasion de le concrétiser. Le monde culturel est très inquiet. Il a besoin de clarification, d’une feuille de route. J’espère que cette crise permettra de donner aux acteurs du monde culturel, artistes et techniciens, la place qui doit être la leur.

Ensuite, l’autre grand aspect, c’est la place de la culture que certains réduisent à une expression, à un divertissement. En plus d’être faux, je pense sincèrement que cela est dangereux pour nos sociétés. Bernard Foccroulle, musicien et ancien directeur du Théâtre de la Monnaie, a déclaré dans la presse de ce mardi que «tous les pouvoirs publics doivent prendre en considération la dimension culturelle dans les plans de relance. Il ne s’agit pas seulement d’assurer la survie du secteur, mais aussi de garantir et pérenniser un droit fondamental de l’être humain face à la complexité du monde. Les acteurs de terrain sont prêts à travailler en transversalité pour les grands enjeux culturels de demain. C’est en réunissant les énergies, les forces et les créativités que la sortie de la crise et la transformation culturelle pourront avoir lieu.» Ces propos résument parfaitement ma conception des choses.